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ANGLAIS — FRANÇAIS

mandée par l’instinct, animée par le flottement d’un invisible drapeau aux couleurs d’Albion.

Le type, en passant au Canada, s’est-il altéré ? J’ai déjà dit mes hésitations sur ce point. Il faudrait plus de recul. Pourtant il semble bien que les traits de l’Anglo-Saxon persistent ici dans une ressemblance que l’éloignement a plutôt accentuée. Ils expriment, et je ne suis pas sûr que ce ne soit pas avec plus de morgue, la même conviction de supériorité, le même coup de mâchoire impassible. L’esprit, déjà peu présent au centre de l’admirable organisme, se fait plus fermé parce qu’il se resserre sur un moindre groupe et s’oppose à un être qu’il a toujours considéré comme un adversaire, français d’origine et, de surcroît, catholique romain. L’action en devient plus vive dans un champ élargi par des conquêtes et des accumulations de richesses. Les ondes émises de Londres sont peut-être amplifiées ; malgré des interférences qui agacent l’oreille tendue, elles pénètrent la masse des mêmes vibrations ; elles nous entraînent même dans leur subtil passage, nous, Français par le sang, dans le mouvement de respect, presque d’affection, qui marque, par exemple, le vingt-cinquième anniversaire d’un couronnement.

Le Français, épris de pensée, ramène sans cesse à lui l’univers des forces, pour l’ordonner dans le sens de ses idées. Il est richement individualiste. Honnête dans ses opinions, il tient d’autant plus à elles qu’il les juge opportunes… « C’est mon opinion, et je la partage » serait un aphorisme très français.