Page:Montpetit - Poissons d'eau douce du Canada, 1897.pdf/196

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
172
LES POISSONS

produits de la pêche pendant quatre semaines donnent pour la paroisse un revenu de $2,500 à $3,000. La pêche à la petite-morue se faisait également en face des paroisses suivantes : Pointe-aux-Trembles, les Écureuils, Cap-Santé, Grondines et Sainte-Anne-de-la-Pérade. Aujourd’hui, le poisson ayant été dépeuplé par la seine, la pêche ne rapporte plus qu’une centaine de dollars par an à chacune de ces paroisses. Les produits de la pêche à la petite-morue ont diminué graduellement, depuis 1882, alors qu’on commença à prendre ce poisson à la seine avant le frayage, dans le bas du golfe. Aux Grondines et à Champlain, on le prend au moyen d’un coffre, instrument de pêche aussi destructif que la seine. La pêche au coffre et à la seine devrait être prohibée, partout, pendant au moins cinq ans, afin de permettre à cet excellent petit poisson de se repeupler.

La gravure que nous reproduisons (fig. 34) représente la cabane de pêche du capitaine Labranche telle qu’elle existait en 1890, sur la glace, en face de Porneuf. Elle avait 12 pieds de longueur sur 8 de largeur.

Le dernier rapport officiel des pêcheries du Canada (1894) accuse, pour la province de Québec, une production de petite-morue ou poisson gelé, de 106,500 livres, évaluée d’ensemble, à $5,325, pendant que le Nouveau-Brunswick montrait orgueilleusement le chiffre de 1,649,500 livres de ce même poisson, d’une valeur approximative de $82,475.

En 1888, nous occupions pourtant le bon côté de la balance contre le Nouveau-Brunswick ; nous récoltions, cette année-là, pas moins de 30,000 minots de petite-morue, céréale des champs de la mer, estimés à $18,000 ; le Nouveau-Brunswick n’ayant à son avoir que 214,500 livres de ce poisson, évaluées à $8,580. Les rôles sont intervertis, et rien ne donne lieu d’espérer le retour aux temps passés, hors la défense absolue de pêcher autrement qu’à la ligne, pendant quatre ou cinq ans, cette précieuse denrée de nos eaux, cette manne de Noël qu’apporte l’Enfant-Dieu aux populations de la rive nord du fleuve, entre Québec et Montréal ; mais quel gouvernement oserait jamais exposer ses oreilles aux protestations qui s’élèveraient, non seulement de la rive immédiatement intéressée, mais encore des campagnes et plus encore de toutes les villes de la province ? Ne touchons pas au petit-poisson de Trois-Rivières, du bout des doigts de la loi, dut-il périr jusqu’au dernier, sur le gril, à l’instar de son patron saint Laurent.