Page:Montpetit - Poissons d'eau douce du Canada, 1897.pdf/236

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
212
LES POISSONS

renchérir sur les pourritures dèjà signalées des pêches fixes au bars, en fascines, sur la rive sud du Saint-Laurent, en aval de la ville de Québec.

Voyant disparaître l’esturgeon des cours d’eau du bassin de l’Atlantique, les pêcheurs américains se rabattirent sur les grands lacs de l’intérieur, propriété commune entre eux et nous. Ils achetèrent d’abord ce poisson à un prix ridiculement bas, de cinq à vingt-cinq sous la pièce. Eh oui, il y a vingt ans à peine, un esturgeon de 30 à 100 livres se vendait sur les grands lacs, de cinq à vingt-cinq sous. La concurrence ne tarda pas à s’établir et à réhabiliter cette chair si riche tombée au rebut, si bien qu’en certaines villes elle se vend aujourd’hui jusqu’à dix centins la livre, pendant que le caviar obtient de dix-huit à vingt centins la livre. Disons en passant que dans la Colombie Anglaise le caviar se vend couramment de cinquante à soixante centins la livre et la demande en augmente tous les jours. Quelques témoignages donnés devant la Commission de 1893 trouveront ici leur place pour corroborer les faits allégués.


Noah Jolie, de Sandwich ouest, a pêché pendant quarante ans dans les rivières St. Clair, Détroit et Maine (Ohio) ; interrogé par M. Wilmot, il répond comme suit :

Q. — Dans votre temps, vous preniez de l’esturgeon ?

R. — Oui, monsieur.

Q. — Quand le pêchiez-vous principalement ?

R. — L’esturgeon n’était pas alors en demande sur le marché, et il nous arrivait d’en prendre de temps à autre avec d’autres poissons.

Q. — Depuis quand l’esturgeon a-t-il pris de la valeur sur le marché ?

R. — Depuis dix ou treize ans. J’en ai pris, il y a vingt ans, dans la rivière St. Clair, et je les ai vendus de cinq centins à vingt-cinq centins la pièce.

Q. — Combien pesaient ces poissons ?

R. — Les plus petits pesaient environ quinze livres et les plus gros près de cent livres.

Q. — Faisait-on du caviar avec les œufs ?

R. — On ne les achetait pas pour cela.


Wm. Backhouse, de Port Burwell, pêche depuis six ans.

Q. — À quelle époque l’esturgeon fraie-t-il ?

R. — Durant presque toute l’année, mais plus particulièrement en juillet et août.

Q. — Quelle est la saison la plus avantageuse pour recueillir les œufs ?

R. — En juin, juillet et août.