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LES POISSONS

L’hameçon, comme la lance, étant inventé de toute antiquité, les modifications les plus profondes qu’il ait éprouvées ont porté sur sa grosseur surtout : il fallait déjà beaucoup d’adresse pour tailler un morceau de coquillage en hameçon de la grosseur de notre 00009 actuel ; or, il y a bien de la distance entre ce numéro et le 20 ou 22 des hameçons fins que nous fabriquons aujourd’hui. Mais il ne faut pas oublier que le nombre des poissons, et surtout leur taille, a diminué en même temps que la taille des hameçons, tandis que la difficulté de les prendre a suivi une marche encore plus rapide. La civilisation, partout où elle touche, rend défiants les animaux autochtones. Ainsi les premiers navigateurs qui abordèrent à certaines côtes privilégiées, y tuèrent à coups de bâton des oiseaux ahuris et ne sachant pas quel était ce nouvel agresseur ; ils y prirent à panerées, pendant la marée basse, les poissons les plus délicieux. De nos jours, les oiseaux ont fui, ou sont devenus défiants ; on ne les tue plus qu’au fusil, et encore : les poissons ont appris la lutte et la méfiance, et si l’on en prend encore là-bas un plus grand nombre avec plus de facilité que sur nos côtes dévastées, il faut l’attribuer à la prodigieuse fécondité de certaines espèces, quand elles sont aidées par la température admirable des climats chauds.


Fig. 65. — Hameçons allégés par des bouchons de liège.


Fig. 66. — Emploi, sur les côtes de Norvège, du bois pour soulever les empiles.

Sans remonter aux temps bibliques et sans nous occuper des animaux aquatiques que les Hébreux tenaient en petite estime, ne connaissaient que très peu dans leur pays sec et désolé — et qu’ils n’ont pu faire entrer dans l’arche de Noé — il faut constater, comme nous l’avons fait, que l’invention de l’hameçon ne peut avoir de date certaine ni même approximative, pas plus que celle de la flèche, de la lance, du bouclier, etc. Ce sont des créations pour ainsi dire instinctives, spontanées, chez tous les peuples répandus à la surface du globe, et tellement inhérentes au développement de leurs facultés, que le premier instrument que fait l’enfant