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SOUVENIRS

sagesse diplomatique l’exigeait trop, il faisait taire son ardeur, posait sa plume, donnait son opinion et, avec un sourire, se contentait de penser ce qu’il n’écrivait pas.

Au surplus, il avait toujours aimé les lettres et fréquenté les auteurs. Il était resté un romantique, fidèle à ses premières admirations. Il taquinait le naturalisme, resté pour lui l’expression voulue de la laideur.

Il avait été des vingt-sept qui suivirent le cercueil de Musset et des deux mille qui, quelques années plus tard, accompagnèrent Murger ; et quelque chose de la tristesse de l’un et de la gaieté résignée de l’autre demeurait en lui. Il avait connu Lamartine et racontait volontiers sa visite, rue de la Ville-l’Évêque, à l’auteur appauvri du Cours familier de Littérature. Surtout, il avait aimé et cultivé Sainte-Beuve. C’était son auteur préféré. Il en conseillait la lecture et le considérait comme son maître ; et peut-être lui devait-il le sens critique et la vision très nette de la réalité qui caractérisent sa manière.

Est-il besoin de montrer comment M. Fabre, par ce culte qu’il avait des lettres, con-