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AGNÈS


« Sœur douce amie, » lui disais-tu, « douce amie,
Les étoiles peuvent s’obscurcir et les amarantes avoir été
Que ma raison ne cessera mie
De radoter de votre beauté ;
Car Cupidon ravive sa torche endormie
À vos yeux, à leur clarté,
Et votre regarder, » lui disais-tu, « est seul Mire
De mon cœur atramenté, »

C’était (tu dois bien t’en souvenir) c’était par un
soir de la mi-automne.

« Vos cheveux traînent jusqu’en bas et nimbent votre face.
Et vos sourires sont les duègnes de votre vertu ;
Ah, prenons garde que notre âme ne se fasse
Putain, Madame, » lui disais-tu.
« Vos cheveux traînent, et vos yeux portent d’azur à la fasce
D’or, et votre corps est de lys vêtu ;
Ah, prenons garde que notre désir ne se farde
Pareil à quelque gnome tortu. »

C’était (tu dois bien t’en souvenir), c’était par un
soir de la mi-automne.