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ANA

A N.


ANA, fils de Sébéon, qu’on croit être un des descendans d’Efaü, trouva le premier les eaux chaudes ou minérales, dans le défert où il menoit paître les âneffes de fon pere, comme il rapporté dans la Genèfe, c. 36, v. 24. Saint Jérôme, S. Ifidore, & quelques autres interprêtes, remarquent que plufieurs écrivains Hébreux, & même des Latins, ont prétendu que cet Ana fut le premier qui ayant mêlé des ânes & des jumens, en vit naître des mulets. Ils fondent leur conjecture fur ce que le texte facré dit, que le fils de Sébéon menoit paître ces animaux, & fur-tout, parcequ’au lieu du mot hébreu jamin, qui veut dire, eaux ou mer, ils lifent jemin, qui felon eux fignifie mulets. Oleafter foutient, en expliquant le Genèfe à la lettre, que ce mot jamin veut dire eau falée, & qu’il n’a jamais trouvé qu’il fignifie mulets, comme ils le prétendent. Les autres croient que jamin eft le nom d’un peuple, qui eft auffi nommé Emin. Il eft plus fur de fe tenir à l’édition vulgate de la Genèfe. En effet, il n’eft pas croyable que le monde eût paffé déjà plus de deux mille ans fans cette efpéce d’animaux, qui n’est pas la moins néceffaire. * S. Hieronym. in quaeft. Ad Genef. S. Ifidorus l. 13 ; etym. c. 1. Uffer, in annal. Sanfon. Bocharr, in Hieroz. & J. le Clerc, comm. in Genef.


ANA ou ANAS, riviere d’Efpagne, cherchez GUADIANA.


ANA, ville de l’Arabie déferte, cherchez ANNA.


ANAB, montagne dans la tribu de Juda, au pied de laquelle il y avoit une ville de même nom, bâtie par les Géans appellés Enacim, & fituée entre Dabir & Iftamo. * Jofué, XI 21, XV, 150. Sanfon. Huré, dict. de la bible.


ANABAGATHA, ville d’Afie, avec le fiége d’un archevêque fous le patriarchat d’Antioche. Nous avons connoiffance de cette ville, par la relation de Léonard Abel, évêque de Saïde, que le pape Grégoire XIII envoya en 1583 en Orient. * Aubert le Mire, in notit. epifc. orbis & in geogr. Ecclef.


ANABALLIEN, cherchez ANNIBALIEN.


ANABAO, une des ifles Moluques, limée au fud-oueft de Timor, longue de dix ou douze lieues, large de quatre. Il y a entre ces deux illes un canal où tous les vaiffeaux peuvent paffer ; fa longueur est la même que celle de fille d’Anabao, fa largeur en quelques endroits n’est que d’un peu plus d’une lieue, & il est fi profond, qu’on n’y fauroit ancrer que bien près de la terre : ce canal court nord-eft &, il n’y a qu’une petite marée, le flux tourne vers le nord. A l’extrémité de ce canal au nord-eft, il y a deux pointes de terre qui ne font pas à plus d’une lieue de diftance l’une de l’ancre : celle qu’on nomme Cupang, & qui eft du côté méridional, appartient à Timor ; celle qui est fur le côté feptentrional appartient à Anabao. * Dampier, voyage de la nouvelle Hollande.


ANABAPTISTES, fecte d’hérétiques du XVI fiécle, ainfi appellés, parcequ’ils rebaptifent tous ceux qui ont été baptifés dans l’enfance, & qu’ils condamnent ce baptême. On n’est pas d’accord fur le temps auquel cette fecte a commencé, ni touchant celui qui en a été le premier auteur. Les uns prétendent que les Bohémiens commencerent à jetter les premiers fondemens de cette fecte dès l’an 1503. Les autres veulent qu’elle n’ait pris naiffance que du temps & à la fuggeftion de Luther, ou de Thomas Munfler, de Zwickau, ville du marquifat de Mifnie, & de Nicolas Starck, de Stolberg en Saxe, fes fectateurs, qui l’abandonnerent, fous prétexte que fa doctrine n’étoit pas affez parfaite ; ils fe vantoient d’avoir des révéla-

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tions, & enfeignoient que c’était par cette voie que les hommes devaient fe conduire. Ils méprifoient les loix eccléfiaftiques & politiques, & ne faifoient aucun cas des facremens, ni du culte extérieur de la religion. Ils condamnaient le baptême des enfans, & rebaptifoient tous ceux qui entraient dans leur communion ; ils infpiroienr de la haine pour les magiftrats, pour les puiffances, & pour la nobleffe ; vouloient que tous les biens fuffent communs, & que tous les hommes fuffent libres & indépendans ; & prometroient un empire heureux, où ils regneroient feuls, après avoir exterminé tous les impies. Munfler ayant publié cette doctrine fédicieufe de vive voix, & par des écrits qu’il répandit dans plufieurs villes d’Allemagne, excita de tous côtés des foulevemens de payfans, qui firent une ligue pour défendre la pureté de l’évangile, & pour fe mettre en liberté. Ils fircnt dreffer manifeste, qui fut comme le fignal de la rebellion, qui fe répandit auffitôt dans toute l’Allemagne ; mais les payfans ayant été battus de tous côtés, poferent les armes, excepté dans la Thuringe, où Munfter avoit établi le principal fiége de fon royaume chimérique à Mulhaufen. Il avoit pour compagnon Pfhiffer, homme hardi, qui difoit que Dieu lui avait révélé de prendre les armes & d’exterminer la nobleffe. Le comte de Mansfeld, & les autres princes d’Allemagne vinrent avec une armée arnaquer cette troupe de mutinés, en firent un grand carnage près de la ville de Francufe, où Munfler fut pris & décapité à Mulhaufen, avec Pfhiffer,, & les principaue chefs de la révolte l’an 1125. Quelques-uns ont dit que Munfter avoit renoncé, avant que de mourir, à fes erreurs, & qu’il étoit mort catholique ; d’autres, qu’il avoir fait profeffion du luthéranifme ; mais tous conviennent qu’étant fur l’échafaut, il reconnut qu’il avoir eu tort d’exciter cette révolte, & qu’il exhorta néanmoins les princes à la clémence. Quoique les chefs des Anabaptiftes euffent été mis à mort, & leur révolte diffipée, leur fecte ne fut pas néanmoins éteinte ; elle s’établit en plufieurs endroits de l’Allemagne & de la Suiffe, & elle étoit principalement fomentée par Balthazar Hubmeïr de Waldshuft, docteur en théologie dans la Souabe. Les Anabaptiftes chafferent d’abord les habitans de cette ville, & en étant chaffés à leur tour, fe réfugierent en Suiffe. Hubmeir s’étant retiré à Zurich, y fut arrêté par ordre du magiftrat, & obligé de faire une rétractation da fes erreurs. Au fortir de Zurich, où il laiffa quantité de difciples, il alla à Conftance ; & après avoir erré long-temps, il fe retira en Moravie, où il féduifit Jacob Hutter ; ayant enfin été arrêté, il fut brulé à Vienne l’an 1517. Manlius fon difciple, qui enfeignait en Suiffe l’anabaptifme, fut arrêté par ordre des magiftrats de Zurich, & noyé la mère année. Gafpard Schwenkfels, gentilhomme de Siléfie, fe joignit au parti des Anabaptiftes, & y ajouta de nouvelles erreurs : car non-feulement il condamnait le baptême des enfans, mais il dépouillait Jefus-Chrift de fa nature humaine ; ne vouloit point reconnaître de magiftrats, & appelloit l’écriture une lettre morte, en comparaifon des révélations. Dans le même temps plufieurs autres docteurs Anabaptiftes enfeignerent diverfes erreurs en différens lieux ; comme David George dans les Pays-Bas, où il fut fuftigé, eut la langue percée, & fut d’abord exilé, pour dix ans : Melchior Horman en Allemagne ; Jacques Kanrz à Wonnes. Quelques-uns niaient que Jefus-Chrift fût Dieu ; d’autres foutenoient qu’il n’étoit pas defcendu aux enfers ; que les ames des morts dormoient jufqu’au jour du jugement ; & que les fupplices des impies finiraient un jour. Ils prophétifoient que le jour du jugement viendroit dans deux ans. Il y en eut trois cens d’affez fous pour s’affembler fur une montagne de Suiffe près d’Appenzel, perfuadés que de-là ils

Tome I. Partie II A