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montagnes au sud du 43° 30′, je ne puis dire si les plateaux s’échelonnent aussi depuis là jusqu’au couchant, en formant une dépression longitudinale entre les plateaux de l’ouest et de l’est, ou si la pente est générale depuis le voisinage de la Cordillère jusqu’à l’Atlantique, mais ce que je puis affirmer, c’est que les terrassements ne sont pas uniformes : j’incline à croire qu’il ne s’agit pas de lignes de soulèvement, et que vraisemblablement l’action glaciaire, qui jadis recouvrit d’une immense calotte de glace toute la Patagonie, comme aujourd’hui les terres polaires, est celle qui a intervenu dans la formation du relief actuel, de même que l’érosion prolongée et active de l’époque postérieure. Il serait difficile d’expliquer autrement que par l’intervention glaciaire directe la présence de roches patagoniques dans les formations côtières de la province de Buenos Aires, depuis l’embouchure du Rio Salado au sud.

Les manifestations colossales de l’érosion en Patagonie doivent être étudiées avec soin pour que l’on puisse distinguer les chaines véritables, tectoniques, des montagnes modelées par l’action des eaux ; mais les phénomènes qui ont produit la curieuse division des eaux à l’ouest et à l’est, et qui actuellement se reproduisent avec fréquence pour des causes identiques ou analogues, n’ont qu’une insignifiante valeur orographique, lors même que les géographes chiliens aient voulu lui assigner une haute signification politique. La protubérance formée dans la plaine située entre Chapelco et Quilquihué, celle de la Laguna Blanca ainsi que celle du rio Fénix peuvent disparaître par un travail de quelques heures et ces accidents orographiques ne peuvent assurément être considérés comme des traits géographiques permanents et encore moins constituer un « axe andin ».

Le soir, nous établissons notre campement sur les bords de l’arroyo Guenguel, à un coude qu’il décrit à sa sortie dans la grande plaine orientale où il se réunit au rio Mayo, et sur laquelle s’élèvent de petits restes de bas plateaux. Près du campement, apparaissent de nouveau les laves basaltiques et l’on aperçoit au nord de la vallée deux lignes de plateaux, tandis qu’il n’y en a qu’une au sud, dans lesquels les grès gris et bleuâtres avec conglomérats, qui entrent dans leur composition, se présentent en couches horizontales. La surface descend en pente douce de l’est à l’ouest, et il ne serait pas étonnant que la ligne de talus de chaque plateau fût formée par la dénudation de couches moins consistantes, travaillées par l’érosion durant la période de l’extension du glacier continental.