Page:Morice - La Littérature de tout à l’heure, 1889.djvu/258

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à l’orage avant que la couvée éclose, elle avorte à demi et les poussins — est-ce une superstition des paysans ? — sont stériles. » — Le temps était à l’orage quand la génération de MM. Richepin et Loti grandissait.

Elle ne laissera rien que le souvenir de prétentions immenses et vagues, une coalition dans le Rien. Les étiquettes-mômes qu’elle a choisies n’ont pas fait fortune : qui se souvient des « Vivants » et des « Brutalistes » ? Pourtant, et par la négative fatalité des choses, plusieurs remplissent, comme on dit et comme ils parleraient, de grandes situations. De temps en temps un avortement considérable de M. Jean Richepin occupe Paris trois heures au moins durant, ou bien c’est M. Jean Aicard qui vient de recevoir à l’Académie son prix annuel, ou encore c’est M. Hugues avec toute une troupe de comédiens qui s’en vont promener dans les Provinces le spectre effarant de Danton. M. Pierre Loti, dont les romans ont une clientèle charmante ou pittoresque de femmes nerveuses qui se reconnaissent dans Rarahu, de lieutenants de navire en retraite qui disent des paysages de là-bas : « Comme c’est ça ! » et de naïfs boulevardiers qui par état patronnent un romancier comme ils accréditent un confiseur, M. Pierre Loti n’inquiète que son aîné, M. Alphonse Daudet. De meilleure humeur ils pourraient s’entendre : l’un travaille dans le pervers et le compliqué, le très pari-