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Jacques Cartier

leurs armes, de leurs vivres, de leurs canots (dans ces « portages » qui sont les trajets à pied sec entre deux nappes d’eau) ; plus tard, quelques-uns apprirent des sauvages l’usage de la raquette, sorte d’appareil formé d’un morceau de bois courbe et garni d’un réseau, dont l’on se sert encore aujourd’hui, et qui permet de marcher sur la neige profonde sans s’y enfoncer, et de la traîne, long traîneau fait d’écorce, qui glisse, sans patins, sur la neige, fort utile pour haler fourrures et provisions. Plus tard encore, le traîneau suédois, à patins celui-là, et attelé d’un cheval, ou le lourd carrosse européen unissaient, suivant la saison, Québec à Montréal, ou les villages avoisinants. Mais c’est grâce au canot d’écorce uniquement, tel que nous le voyons à la page dix, que les premiers explorateurs purent pénétrer jusqu’aux grands lacs intérieurs et, de là, aux Montagnes Rocheuses et à l’Océan Pacifique.

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Nous voudrions, en quelques pages, brosser un bref tableau de ces grands découvreurs. Forcément incomplètes, ces lignes suffiront néanmoins à faire ressortir un peu de la couleur et de l’éclat d’une audacieuse épopée. Le 3 août 1529, le traité de Cambrai avait rendu la paix au royaume de France. Devant les succès espagnols et portugais dans l’Amérique centrale et méridionale, l’on se remit à penser au Nouveau Monde, et le Roi, sur le conseil de l’amiral de France, Philippe de Chabot, chargea Jacques Cartier, navigateur de Saint-Malo, d’une expédition qu’il espérait devoir rapporter de grandes richesses.

Cartier fit voile en 1534, et pénétra, par le détroit que l’on nomme maintenant Belle-Isle, dans le golfe Saint-Laurent. Il trafiqua avec les indigènes, visita un peu de pays, reconnut la côte aride du Labrador, et longea le Nouveau-Brunswick et l’île du Prince-Édouard actuels. Le trois juillet, par une température torride, il entra dans une baie qu’il baptisa, pour cette raison, Baie des Chaleurs. Puis, parvenu devant la baie de Gaspé, il prit possession du pays en dressant une croix ornée d’un écusson fleurdelisé et qui portait ces mots : Vive le Roi de France. Ce voyage d’environ cinq mois devait le conduire à la découverte de notre grand Fleuve, dont deux jeunes Hurons, qu’il amena en France, lui apprirent l’existence.