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elle songeait à la joie qu’elle aurait à son réveil, en retrouvant sa félicité toujours la même, toujours immuable, comme une amie qui aurait veillé à côté d’elle.

Leurs entrevues nocturnes se prolongeaient. Ils prirent les dernières dispositions.

Puis, le lendemain, elle dit à ses parents, les ayant regardés bien en face :

— C’est entendu avec Pierre, nous nous marions dans deux mois !

Le souper finissait quand Pierre entra chez les Thiriet, venant, suivant l’usage, courtiser sa « bonne amie ».

Le vieux Dominique l’accompagnait, ayant passé pour la circonstance sa blouse de cérémonie, une blouse de toile bleue, ornée de broderies blanches aux poignets et sur les épaules.

La chose se passa très simplement : il y eut dès le premier moment comme une sensation de gêne. Tous ces gens, très émus, se regardaient, et personne ne se décidant à parler, le silence se prolongeait.

Enfin le garde forestier intervint.

Campé devant Pierre, il se croisa les bras, et le dévisageant avec bonne humeur, il dit, sur ce ton à la fois bienveillant et bourru, qui lui était habituel :

— Alors, tu te décides, mon garçon ? Eh bien, vrai, tu y as mis le temps.

Marthe prit les devants, et tenta d’excuser Pierre, tout son fin visage animé par un adorable sourire :

— Laisse tranquille, père. À quoi bon parler du passé ?

Alors le garde conclut :