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Il était si grand, qu’on eût dit le roi de toute cette flottille.

À l’arrière une planche découpée portait ce nom : Reine des eaux, gravé en lettres d’or.

Pierre s’était levé de bonne heure ce matin-là. Il se sentait les muscles reposés, l’esprit alerte, et toute la clarté matinale le pénétrait de sa joie.

La pêche s’annonçait bien, et ils pourraient revenir plus tôt qu’ils n’avaient pensé. En songeant à son mariage qui était si proche, il se sentait pénétré d’une joie aussi vive que cette aube frissonnante. Il attendait ce moment, sans émoi et sans trouble, avec une confiance tranquille, comme on attend un bonheur dont on est sûr.

Les fleurs des scabieuses avaient déjà les tons décolorés, cette teinte violette et doucement passée qui indique que la saison s’avance et que les grandes chaleurs vont venir. Sur les sentiers humides, les seigles très grands laissaient retomber leurs épis barbus qui tremblaient dans le vent, pénétrés de lumière.

Une barque était amarrée à la berge, toute pareille à l’autre, celle qu’ils conduisaient dans leur pays.

Se couchant à l’arrière sur le ventre, comme font les pêcheurs riverains, il la lança au milieu du courant d’un coup de pied donné à la berge.

La barque partit, tournoya au milieu des remous, puis accéléra sa course.

Debout à l’arrière, Pierre la dirigeait avec un grand aviron.