Page:Moselly - Terres lorraines, 1907.djvu/159

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une résolution et passant sa blouse à la hâte il s’en fut vers la ville, à pas pressés, chercher un médecin.

Par un fait exprès, le docteur était absent, ayant été appelé dans une commune avoisinante.

On ne l’attendait plus dans la maison anxieuse, quand il arriva tout à la fin de l’après-midi.

Il descendit de son cabriolet, dont les roues étaient enduites d’une couche épaisse de glaise, à force d’avoir roulé dans les chemins de traverse. Le bidet de campagne qui y était attelé avait une toison jaunâtre et boueuse, qui lui donnait l’air d’un animal sauvage. Mais il était résistant, sous cette apparence chétive, et menait un galop d’enfer.

Le médecin pénétra dans la grande chambre du premier.

C’était un homme d’aspect bourru et renfrogné, dont les longs silences terrorisaient les paysans, qui, selon leur habitude, ne le consultaient qu’à la dernière heure, quand il était trop tard. Un brave homme au fond, qui, à la fin de l’année, oubliait souvent d’adresser la note de ses visites aux pauvres diables. Tout en parlant, il relevait ses lunettes sur son front d’un geste machinal et lançait un regard aigu, qui vous entrait jusqu’au ventre.

Il ausculta Marthe, la palpa, l’examina soigneusement. Par moments il hochait la tête, comme pour approuver des réflexions qu’il se faisait à part lui. Les deux vieux, retenant leur souffle, ne comprenant rien à ce manège, épiaient anxieusement ses moindres jeux de physionomie, cherchant à lire sur son visage.

Quand il eut fini son examen, il borda soigneusement la malade, et releva l’oreiller derrière sa tête,