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Mais le médecin lui coupa la parole, en lui disant : « Qu’en savez-vous ? » d’un ton si tranquille, que le garde resta tout décontenancé.

Puis il leur donna le conseil de « raccommoder » ensemble les deux jeunes gens. Tous les paysans en étaient là, avec leur rapacité, leurs habitudes d’avarice. Ils faisaient le malheur de leurs enfants, en ne voulant pas les marier, quand l’un avait deux bouts de terre de plus que l’autre. Il aurait fallu une balance pour peser les conjoints. Qu’attendaient-ils pour avoir des petits-enfants, qui leur fourreraient les doigts dans les yeux, et leur grimperaient dans les jambes ?

Pour le coup le vieux garde se récria. Il en parlait à son aise ; mais les choses ne se passaient pas de la façon qu’il imaginait. Eux donnaient leur consentement, ne regardaient pas à la richesse. Mais la faute revenait au garçon qui était coureur, qu’on disait lâché parmi les filles de l’endroit, comme un coq au milieu d’un poulailler.

Le médecin, têtu, ne voulait rien entendre.

— Ça ne fait rien, disait-il. On va trouver le garçon. On lui parle. Quand on a une langue, c’est pour s’en servir. C’était par de tels malentendus que survenaient des malheurs irréparables. Les vieux étaient tenus d’avoir de l’expérience pour les jeunes, qui s’en allaient dans la vie sans rien savoir, et se cassaient le nez à tous les obstacles. D’ailleurs, il était impossible qu’un garçon de vingt ans n’eût pas de goût pour une jeunesse aussi appétissante…

Puis il conclut solennellement, ayant levé le doigt :

— Mettez-vous tout ça dans l’entendement. Ça pour-