Page:Mousseau - L'envers du journalisme, 1912.djvu/31

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
40
L’ENVERS DU JOURNALISME

infini ; mais ils prirent toute l’après-midi à en faire le tour et à visiter les divers kiosques.

Quand ils se quittèrent, à la porte du notaire, ils songeaient à tout autre chose qu’au bazar et Martin avait oublié qu’il était reporter.

La bénédiction de l’église avait lieu le troisième jour et un grand banquet arrosé de vins fins et agrémenté de discours devait terminer le tout.

Martin se rendit de bonne heure à l’église, où il attendit, rêveur, que la cérémonie commençât.

Quand le clergé fut rassemblé sur le perron de l’église et que la voix de l’évêque qui officiait s’éleva, Martin fut frappé de la beauté du spectacle qu’il avait sous les yeux.

Par-delà le groupe de surplis blancs et rouges et la foule des fidèles, on apercevait la campagne, blanche et inondée de soleil. Une petite rivière, que le gel n’avait pas encore complètement emprisonnée, coulait entre deux rives de neige. — Ce tableau eut tenté un peintre.

Aussitôt après, la cérémonie, Martin se rendit au bureau du télégraphe, afin d’envoyer une courte note pour le journal du jour. Il décrivit ce qu’il avait vu et il transporta du paysage dans son compte rendu la petite rivière argentée coulant dans la neige, si bien que Goyon, qui recevait les correspondances et les télégrammes, dit, en lisant la description de la cérémonie : « bon ! en voilà un qui mêle les rivières aux bénédictions d’églises ; nous avons un poète-reporter. »

En parcourant le journal, le soir, Dorion murmura, à moitié moqueur et à moitié satisfait : « Il se lance, le « nouveau », il se lance. »