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L’ENVERS DU JOURNALISME

vant à faire la chasse aux oies sauvages. On se perdait en conjectures sur les motifs du crime.

Il était près d’une heure de l’après-midi. Goyon, qui avait reçu la nouvelle, la rédigea à la hâte et lui fit un titre sur deux colonnes, et on l’envoya vite à la composition.

C’était vraiment un meurtre « idéal », bien fait pour permettre d’écrire des colonnes de suppositions et d’hypothèses. — Pourvu que les autres journaux ne l’eussent pas.

Trois heures arriva et le journal sortit des presses, avec le meurtre étalé en dernière page. Quelques minutes plus tard, un garçon apportait à la rédaction les feuilles rivales, qu’il était allé acheter dans la rue. Elles n’avaient pas la nouvelle.

Ce fut une explosion de joie : un si beau scoop !…

On allait maintenant en tirer tout le parti possible, puisqu’on était seul à l’avoir.

Martin reçut ordre de se rendre à Beauséjour et de s’enquérir des circonstances du meurtre, en attendant l’enquête du coroner.

Il partit, pénétré de l’importance de la tâche qu’il lui fallait accomplir.

En arrivant à Beauséjour, il se renseigna, à la gare, sur ceux sur qui portaient les soupçons, et, ayant appris que l’on soupçonnait la famille de la femme du défunt d’avoir fait le coup, il se fit conduire droit chez les beaux-parents du défunt.

Il avait plu et les chemins étaient couverts d’un pied de boue. La nuit était absolument obscure ; on se serait cru renfermé dans un trou noir dont on ne