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d’examen, le docteur Gaillard déclara qu’il serait prudent de refermer le cercueil, afin de soustraire ces restes précieux aux influences de l’air atmosphérique.

À trois heures, tous les travaux relatifs à l’exhumation sont terminés, et les restes mortels renfermés dans six cercueils : un en fer blanc, un deuxième en acajou, un troisième et un quatrième en plomb, séparées par des coins et de la sciure de bois, un cinquième en bois massif d’ébène, enfin un sixième enveloppant tous les autres, en bois de chêne.

Le cercueil en bois d’ébène a été confectionné à Paris, par les soins du directeur des pompes funèbres. Sa forme rappelle celle des sarcophages antiques ; il est long de 2 mètres 56 centimètres ; sa hauteur est de 70 centimètres et sa largeur de 1 mètre 5 centimètres. Il porte sur son couvercle, pour toute inscription, le mot Napoléon en lettres d’or. Chacune de ses faces est décorée de la lettre N en bronze doré. Six forts anneaux en bronze servent à le saisir et à le déplacer.

Le cercueil total pesant 4.200 kilogrammes, fut placé sur le char funèbre par 43 artilleurs. Les demoiselles de l’île offrirent au commissaire français les drapeaux tricolores qui devaient servir à la cérémonie, et qu’elles avaient confectionnés de leurs mains, ainsi que le pavillon impérial qui flottait sur la frégate la Belle-Poule.

À trois heures et demie le cortège se mit en marche sous le commandement du gouverneur de l’île. MM. le comte Bertrand, baron Gourgaud, baron Las-Cases fils, et M. Marchand, portaient les coins du drap. Un détachement de milice, suivi d’une foule de peuple, fermait la marche, pendant laquelle les forts tiraient le canon de minute en minute.

Parvenu à James-Town, le convoi défila entre deux haies de soldats de la garnison, ayant leurs armes renversées. À cinq heures et demie, le cortège arriva au débarcadère ; là, le prince de Joinville, entouré de son état-major, reçut du gouverneur de Sainte-Hélène le cercueil impérial et le fit placer sur la chaloupe de la Belle-Poule. La précieuse dépouille passa à bord de la frégate entre deux haies d’officiers sous les armes. À ce moment les navires se pavoisèrent et les équipages se rangèrent sur les vergues pendant que leur artillerie multipliait les salves d’honneur. Sur la Belle-Poule, 60 hommes étaient sous les armes, les tambours battaient aux champs et la musique faisait entendre des airs nationaux. À six heures et demie, le cercueil fut déposé dans une chapelle ardente, ornée de trophées militaires, qu’on avait dressés à l’arrière du bâtiment.

Le dimanche 18, à huit heures du matin, on fit voile pour la France. Aucun accident remarquable ne signala, pendant les cinq premiers jours la marche de la Belle-Poule et de la Favorite ; mais elles rencontrèrent, le 31 octobre, un navire de commerce, le Hambourg, dont le capitaine fit part au prince de Joinville des nouvelles d’Europe ; elles faisaient craindre une rupture prochaine entre l’Angleterre et la France. Ces bruits de guerre furent confirmés par le bâtiment hollandais l’Egmont, qui faisait route pour Batavia. Le prince de Joinville s’empressa de former un conseil de guerre où furent appelés les officiers de la Belle-Poule et de la Favorite ; il s’agissait d’arrêter les dispositions nécessaires pour empêcher que le dépôt confié à l’honneur et au courage de la marine française ne lui fût enlevé par l’ennemi. Une résolution énergique fut bientôt adoptée. Il fallait d’abord mettre en batterie toutes les pièces que la frégate pouvait opposer à une attaque. On démolit