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risation du préfet, imprimer à Rome une lettre adressée à M. Renouard, son libraire, dans laquelle il lui racontait des circonstances de sa querelle avec le sous-bibliothécaire de San Lorenzo de Florence, qui l’accusait d’avoir sciemment maculé d’une tache d’encre une page d’un manuscrit du roman de Longus, Daphnis et Chloé : aussi eut-il deux ministres à ses trousses ; mais l’Empereur, sur ce qu’on lui dit d’un officier retiré à Rome, qui faisait du grec, ordonna qu’on le laissât tranquille.

Nous ne suivrons pas Paul-Louis Courier dans ses courses scientifiques à travers l’Italie ; il était à Paris en 1812, traduisant force grec, jouant à la paume, et passant les beaux jours, tantôt en Touraine, tantôt à Saint-Prix, dans la vallée de Montmorency.

Vivement affecté par les événements de 18U, il voulait quitter Paris pour toujours, mais un sentiment tendre l’y retint, et, le 12 mai, il s’unit à la fille aînée de M. Clavier.

C’est vers cette époque qu’il commença la publication de ses pamphlets.

Le plus vif intérêt s’attacha à Courier dès qu’il parut. Aussi avait-il tout ce qu’il faut pour se rendre populaire : une grande liberté d’opinion, une originalité piquante dans les formes du style, il faut dire aussi cette audace satirique qui fait jouir les petits de l’humiliation des grands, surtout cet arl de rendre la vérité accessible à tous, simple, et, comme il disait, vulgaire et villageoise.

Dans quelques-uns de ces petits écrits où Courier meltait tant d’art à n’en pas laisser paraître, et réunissait si bien à cacher la malice de sa pensée sous une certaine bonhomie d’expression, l’écrivain disparaît. C’est Paul-Louis, bon paysan de la Touraine, qui cause avec ses voisins de son bois de Larçay, de ses vignes de Véretz ; prenant delà occasion

pour leur donner, en leur langage, une leçon non pas d’agriculture (ce qui l’eût peut-être embarrassé un peu), mais de morale et de politique.

C’est aussi Paul-Louis qui rédige la gazette de son village, toute innocente, si vous l’en croyez, et faite seulement pour les bonnes gens qui demeurent entre le Pont-Clouet et le Chêne-Fendu. Elle donne les nouvelles des champs : « les rossignols chantent et l’hirondelle arrive ; » les détails et la vie rustique, comme M. l’abbé Delille, « Les vaches ne se vendent point. Les filles étaient chères à l’assemblée de Véretz, les garçons hors de prix. On n’en saurait avoir. Tous et toutes se-marient à cause de la conscription. Deux cents francs un garçon, sans le denier à Dieu, sabots, blouse et un chapeau pour la première année. Une fille vingt-cinq écus. La petite Madelon les refuse de Jean Bedout, encore ne sait-elle boulanger ni traire. » Ailleurs, c’est l’histoire, oh ! bien triste, d’Urbain Chevrier et de Rosé Deschamps. Le bon journaliste en pleure.

Mais une gazette, même au village, ne peut toujours vivre de cette innocente vie. Tout faiseur, de journal doit tribut au malin. Celle-ci d’ailleurs est de l’opposition, et, comme telle (ainsi que le disait Boileau, qui pouvait le savoir), un peu née pour être mécontente. ’ Son rôle est de faire la méchante, la grosse voix, l’air grondeur. Point de ministres à la vente entre le Pont-Clouet et le Chêne-Fendu, et c’est dommage, mais on a le maire, faute de mieux.

« M. le maire est le télégraphe de notre commune : en le voyant on sait tous les événements. Lorsqu’il vous salue, c’est, que l’armée de la Foi a reçu quelque échec ; bonjour de lui veut dire une défaite là-bas. Passe-t-il droit et fier ? la bataille est gagnée ; il marche sur Ma-. drid, enfonce son chapeau pour entrer