Page:Mullié - Biographie des célébrités militaires des armées de terre et de mer de 1789 à 1850, I.djvu/336

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dans la ville capitale des Espagnes. Que demain on l’en chasse, il nous embrassera, touchera dans la main, ami comme devant. D’un jour k l’autre il change, et du soir au matin est affable ou brutal. Cela ne peut durer, on attend des nouvelles, et, selon la tournure que prendront les affaires, on élargira la prison ou lés prisonniers. »

Mais on dirait que, pour se venger de la Gazette, le maire en a fait le journal de la mairie. Voici bien la gravité officielle. On dirait des nouvelles de la cour dans le Moniteur. « M. le maire a entendu la messe dans sa tybune. Après le service divin, M. le maire a travaillé dans son cabinet avec M. le brigadier de la gendarmerie, ensuite de quoi ces messieurs ont expédié leur messager, dit le Bossu, avec un paquet pour M. le préfet en main propre. Nous savons cela de bonne part, et que le porteur doit revenir avec la réponse ou le reçu, même on l’a vu passer près de la Ville-aux-Dames, où il a bu un coup. Quant au contenu des dépèches, rien n’a transpiré ; on soupçonne qu’il s’agit de quelques mauvais sujets qui veulent danser le dimanche et travailler le jour de Saint-Gilles. « Madame, femme de M. le maire, est accouchée d’un gentilhomme, au son des cloches de la paroisse. » Telle est la Gazette du village, moqueuse sans amertume, quelquefois naïve comme une fable du bonhomme. Ailleurs, au lieu de cette gaîté douce, de cet aimable enjouement, ce sera une humeur bouffonne et folle, comme dans la pièce diplomatique et dans quelques passages de la lettre à M. Renouard, ou plus souvent cette ironie aiguë comme la satire de Juvénal et de Gilbert, qui n’épargne rien dans la guerre qu’elle croit ne faire qu’aux préjugés : terrible à l’Académie qui le refuse, aux concurrents coupables de lui avoir été préférés, payant en sanglantes épigrammes ce qu’il doit de persécutions aux puissants du jour, et quelquefois touchant ses amis eux-mêmes de son arme seulement à demi émoussée.

Quelques années plus tard, il empruntait la même forme pour un tout autre sujet. Comme il s’était voué à la défense de tous les droits, il eii réclamait un, « antique, se plaisait-il à dire, légitime, acquis et consacré par les premières lois de la raison et du bon sens ; » le droit, pour les filles et les garçons d’Azay, de danser sur la place publique, non plus même (car il n’était pas homme à transiger) au son de la musette, comme Guil-lot et Perrette dans le refrain tourangeau, mais au violon, noblement, comme à la cour de Louis XIV. Paul-Louis n’avait pas, pour son compte, grand intérêt à la question : « Peut-être, dit-il quelque part, n’aurais-je pas dansé s’il m’eût été permis. » Et je Je crois bien. Mais il parlait pour son village, du resle, prenant la chose assez gaiment. Tout le monde ne la prit pas ainsi. Quelques boutades faillirent lui couler cher, mais il en fut quitte pour une simple réprimande ; et, malgré les fulminantes réquisitions de l’accusateur, homme impayable, disait Courier, et (/ici, par son adresse, eût fait mettre en prison les sept sages de la Grèce, cette fois la condamnation manqua.

Quelque temps auparavant, il n’avait pas été aussi heureux. Son simple discours lui avait valu deux mois de prison et 200 francs d’amende. C’était à l’occasion de la souscription proposée pour l’acquisition du domaine de Cham-bor.l.

Courier était de ces esprits difficiles qui ne croient pas à la liberté des cadeaux faits aux princes, et qui trouvent un air de tribut aux plus volontaires, aux plus amoureuses offrandes. Venant de bas en