Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/118

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fecture, et qui, malgré son état de vétusté, pouvait encore parfaitement s’habiter.

Madame Sloterin avait prié le préfet de parler en sa faveur au successeur de son mari, et de lui demander l’autorisation d’occuper cette vieille maison, jusqu’au jour de ses couches. C’était cette demande qui venait d’être accordée avec tant d’empressement par Havelaar et sa femme, tous deux, généreux et hospitaliers au plus haut degré.

Le préfet les avait prévenus que Madame Sloterin était une femme indigène. Cela demande une explication pour les lecteurs qui ne connaissent pas les Indes. Il ne faut pas qu’ils se figurent avoir affaire ici à une Javanaise, pur sang.

Aux Indes, la société Européenne se divise, ostensiblement, en deux parties bien distinctes. Les Européens véritables, et ceux qui tout en jouissant légalement des mêmes droits, ne sont pas nés en Europe, et ont plus ou moins de sang indigène dans les veines. À l’honneur de l’esprit humanitaire, je m’empresse d’ajouter ici, que dans ces contrées, nonobstant la ligne de démarcation bien tracée entre ces deux classes d’individus, qui, pour les Indiens sont tous des Hollandais, cette division n’a nullement le caractère barbare, prédominant en Amérique, dans la séparation des classes blanche et noire. Je ne nie pas qu’il y ait encore bien de l’injustice dans tout cela, et que le mot : lippu appliqué à certains individus ne prouve pas que le non lippu, ou l’homme blanc, soit le seul et vrai civilisé. Je conviens que le lippu n’est reçu qu’exceptionnellement dans les cercles, qu’ordinairement, si vous voulez me permettre d’employer une expression familière, on le considère comme un être incomplet ; mais, rarement,