Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/159

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je ne suis pas aussi excentrique que j’en ai l’air, quand je m’occupe du juste et de l’injuste. Vous voyez qu’il y en a d’autres, qui en ont fait tout autant, avant moi.

— Il est vrai ! balbutia Dipanon, monsieur Sloterin a souvent parlé de tout cela à monsieur le préfet.

— Et qu’en est-il advenu ?

— Dame… on en référait au Prince-Régent… On les abouchait ensemble.

» Et après ?

— Ordinairement le Prince-Régent niait tout. Alors, il fallait faire comparaître des témoins… et, naturellement, personne n’osait témoigner contre le Prince-Régent ! Ah ! monsieur Havelaar ces affaires-là sont si difficiles !

Aussi bien que Dipanon, le lecteur saura avant d’avoir fini la lecture de cet ouvrage, comment et pourquoi, ces affaires-là étaient si extraordinairement difficiles.

— Monsieur Sloterin, continua Dipanon, était désolé de tous ces abus et de tous ces excès. Il adressa même des missives très sévères aux chefs…

— Je les ai lues, cette nuit, fit Havelaar.

— Et souvent je lui ai entendu déclarer que s’il n’y avait pas de changement ; et que si le préfet ne poursuivait pas les délinquants, il s’adresserait au Gouverneur-général. Il dit cela aux chefs eux-mêmes dans la dernière séance du conseil qu’il eut à présider.

— Il aurait mal agi… Il aurait eu parfaitement tort en s’y prenant ainsi !… Le préfet était son chef direct ; il ne devait pas le mettre de côté, en aucun cas ! Et comment l’aurait-il mis de côté ? Après tout, il est inadmissible que le préfet de Bantam approuve l’arbitraire et l’injustice !