Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/199

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Phocéennes d’Arles ; et pourtant elle n’avait pas tant de raisons que cela, d’être fière de son nez.

Declari pensait de plus en plus que Havelaar était, pour le moins, toqué… et franchement on n’avait pas trop le droit de lui reprocher cette opinion, en réfléchissant à l’irritation momentanée qui se lisait sur les traits de Havelaar, après cet éternuement. Aurait-il donc voulu que Tine ne se mouchât point ! — Non, mais Havelaar revenait de Carthage, et il lisait, avec sa rapidité ordinaire, qui était réellement extraordinaire quand son esprit ne courait pas la prétantaine, il lisait sur la physionomie de ses hôtes les deux axiomes suivants :

1°. Ne pas vouloir que sa femme se mouche est l’acte d’un fou.

2°. On peut à la rigueur exiger qu’un nez grec ne se mouche pas ; mais il est absurde d’en demander tout autant au nez de madame Havelaar qui ressemble à une pomme de terre, comme une goutte d’eau ressemble à une autre goutte d’eau.

Havelaar ne daigna pas faire attention à l’axiome n°. 1… mais, le numéro 2, quoique ses hôtes se fussent bien gardés d’en exprimer la première syllabe, le fit s’écrier :

— Je vais vous expliquer cela, moi. Tine est…

— Mon cher Max ! fit Tine d’un air suppliant, qui signifiait : ne va pas raconter à ces messieurs pourquoi tu n’admets pas que je puisse m’enrhumer !…

Havelaar comprit sa Tine à demi-mot, car il répondit immédiatement :

— Bon, mon enfant, Bon ! Mais je vous parie ce que vous voudrez, messieurs, que vous vous trompez, tous les deux, dans votre façon de juger les gens qui prétendent arriver à l’imperfection matérielle !