Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/273

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m’en suis repenti !… J’ajouterai même que je ne me serais pas borné à protester purement et simplement contre la façon dont le général interrogeait les témoins, et à refuser de contresigner quelques uns des procès-verbaux, si alors j’avais pu deviner ce que je n’ai su que bien plus tard, c’est à dire si j’avais deviné que tout cela provenait d’un parti pris de charger et d’accabler mon prédécesseur. Je croyais que le général, convaincu de l’innocence de Si Pamaga, se laissait entraîner par le désir respectable de réhabiliter, d’arracher une pauvre victime aux suites d’une erreur judiciaire, et cela autant que faire se pouvait, puisque le malheureux avait subi le fouet, et la flétrissure. Cette opinion ne m’empêchait pas de protester contre ces faux ; mais je n’en étais pas indigné comme je l’aurais été si j’avais pu me douter qu’il ne s’agissait nullement ici de sauver un innocent, mais bien d’annuler, aux dépens de l’honneur, et du bien-être de mon prédécesseur, des preuves compromettantes pour le général.

— Et votre prédécesseur, qu’est-ce qu’il est devenu ? demanda Dipanon.

— Heureusement pour lui qu’il était déjà parti pour Java, avant le retour du général à Padang. Il parait qu’il a trouvé moyen de se justifier auprès du Gouvernement, à Batavia ; du moins, il est resté en fonctions. Le préfet d’Ayer-Bangie, qui avait ratifié le : fiat executio, de l’arrêt, a été…

— Suspendu ?

— Naturellement. Vous voyez que, dans mon épigramme, j’avais bien le droit de dire que le Gouverneur nous gouvernait en nous suspendant.

— Et que sont devenus tous les fonctionnaires suspendus ?