Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/294

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sa lutte contre les méchants, de sa carrière et de son avancement, de ses devoirs d’époux et de père, mais encore à dominer, à vaincre la faiblesse de son propre cœur.

Il ne pouvait voir la douleur d’autrui sans en souffrir lui-même.

Cela me conduirait trop loin, si je voulais vous citer toutes les circonstances dans lesquelles, se trouvant insulté, offensé, il lui arrivait de prendre le parti de son adversaire, contre son propre intérêt.

Il avait bien raconté à Dipanon et à Declari que, dans sa jeunesse il trouvait quelque chose d’attrayant dans un duel au sabre, ce qui était vrai, mais il s’était bien gardé d’ajouter, qu’après avoir blessé son adversaire, il s’attendrissait jusqu’aux larmes, et le soignait comme une sœur de charité jusqu’à son rétablissement complet.

Je pourrais vous dire aussi comment il prit à sa charge, et logea chez lui, à Natal, un forçat qui avait tiré sur lui. Il lui adressait doucement la parole ; il lui laissait plus de liberté qu’à tous les autres, pensant avoir découvert que l’exaspération de ce condamné provenait d’un arrêt trop sévère, prononcé dans une autre juridiction.

Son indulgence était ordinairement niée ou ridiculisée ; niée par tous ceux, qui confondaient son cœur avec son esprit : ridiculisée par d’autres, qui ne comprenaient pas qu’un homme si intelligent se donnât la peine de sauver une mouche empêtrée dans une toile d’araignée ; niée de nouveau par chacun, excepté par Tine, qui l’entendait, alors, se déchaîner contre ces animaux stupides, et contre la stupide nature, qui avait créé ces stupides animaux.

Ses détracteurs avaient trouvé une manière bien