Page:Multatuli - Max havelaar, traduction Nieuwenhuis, 1876.djvu/370

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un jeune buffle tomba ; les paysans se réunirent à cette place pour sauver la bête, — on sait que perdre un buffle, ce n’est pas une petite affaire ! — suspendus à de fortes cordes, ils descendirent ; le père d’Adenda se montra l’un des plus résolus…

Oh ! comme Adenda l’avait encouragé, et applaudi !

Et là-bas, de l’autre côté, sur cette hauteur où le bois de cocotiers domine les cabanes du village, là, Si-ounah s’était tué en tombant du sommet d’un arbre. Sa mère avait bien pleuré, car il était si petit, si petit ! Elle pleura plus que si elle avait perdu son enfant, arrivé à l’âge d’homme !

Il est vrai que Si-Ounah était bien petit… il était plus petit, et plus faible qû’Adenda.

Personne encore sur le sentier, qui conduit de Badour à l’arbre !

Tout-à-l’heure elle viendra…

Oui, il fait à peine jour !…

Saïdjah aperçut un écureuil, qui, leste et agile, folâtrait, et sautillait sur le tronc d’un cocotier. La gentille petite bête, aussi jolie de forme, que gracieuse dans ses mouvements, sans se soucier des malédictions du propriétaire de l’arbre, allait, venait, montait, descendait, sans se lasser, tout le long de ce tronc.

Saïdjah regardait l’écureuil, et ne se fatiguait pas de le regarder ; c’était comme un point d’arrêt imposé à ses pensées, une suspension du pénible travail qu’elles faisaient depuis le lever dû soleil.

Il trompait ainsi l’attente, qui le torturait.

Peu à peu ses impressions s’exhalèrent en paroles cadencées, et il chanta ce qui se passait en son âme.

Faut-il l’écrire, cette chanson ?

Oui.