Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Œuvres posthumes.djvu/196

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Faustine.

De quel honneur veux-tu parler ? Est-ce du mien, mon frère ?

Michel.

C’est du nôtre à tous. L’honneur, Faustine, cette barrière sacrée, ce trésor enfoui au seuil de la famille, tu as marché dessus pour sortir d’ici. Quand cette maison où nous sommes serait une cabane au lieu d’un palais, devant l’honneur, il n’y a ni riche ni pauvre, et la tache que ne ferait pas la fille d’un pêcheur au manteau troué de son père, la fille des Lorédan la fera au Livre d’or, à la place où est son nom !

Faustine.

Si tu respectais ce nom autant que tu veux sembler le faire, tu ne commencerais pas par outrager ta sœur. As-tu bien compris ce qu’elle t’a dit ? Je te le répète : j’aime et je suis aimée. Hier, on m’a appris que Visconti arrivait, et que je devais appartenir à un autre que celui à qui appartient ma vie. Je n’ai pas craint ta colère, pas plus que l’arrivée du seigneur Visconti, pas plus que votre politique, prête à me faire d’un linceul une robe nuptiale. Ce que j’ai redouté, c’est un mot de mon père, c’est sa juste et froide raison, forte de toute son expérience, plus forte encore de ma tendresse pour lui. Qui sait ? peut-être une prière, une larme à côté de ses cheveux blancs, voilà ce dont j’ai voulu me défendre. Être fidèle à la foi jurée, appelles-tu cela forfaire à l’honneur ? Le vôtre, à vous, se montre par-