fait. Maintenant, sais-tu ce qui m’arrive, et ce dont je veux t’avertir ?
Tu es notre Brutus si tu dis vrai.
Je me suis cru un Brutus, mon pauvre Philippe ; je me suis souvenu du bâton d’or couvert d’écorce. Maintenant je connais les hommes et je te conseille de ne pas t’en mêler.
Pourquoi ?
Ah ! vous avez vécu tout seul, Philippe. Pareil à un fanal éclatant, vous êtes resté immobile au bord de l’océan des hommes, et vous avez regardé dans les eaux la réflexion de votre propre lumière ; du fond de votre solitude, vous trouviez l’océan magnifique sous le dais splendide des cieux ; vous ne comptiez pas chaque flot, vous ne jetiez pas la sonde ; vous étiez plein de confiance dans l’ouvrage de Dieu. Mais moi, pendant ce temps-là, j’ai plongé ; je me suis enfoncé dans cette mer houleuse de la vie ; j’en ai parcouru toutes les profondeurs, couvert de ma cloche de verre ; tandis que vous admiriez la surface, j’ai vu les débris des naufrages, les ossements et les Léviathans.
Ta tristesse me fend le cœur.