Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/233

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Maître André.

Ah çà ! ma femme, êtes-vous sourde ? [Vous avez un amant, Madame ; cela est-il clair ? Vous me trompez. Un homme, cette nuit, a escaladé nos murailles. Qu’est-ce que cela signifie ?]

Jacqueline.

Faites-moi le plaisir d’ouvrir le volet.

Maître André.

Le voilà ouvert ; vous bâillerez après dîner ; Dieu merci, vous n’y manquez guère. Prenez garde à vous, Jacqueline ! Je suis un homme d’humeur paisible, et qui ai pris grand soin de vous. [J’étais l’ami de votre père, et vous êtes ma fille presque autant que ma femme.] J’ai résolu, en venant ici, de vous traiter avec douceur ; et vous voyez que je le fais, puisque, avant de vous condamner, je veux m’en rapporter à vous, et vous donner sujet de vous défendre et de vous expliquer catégoriquement. Si vous refusez, prenez garde. Il y a garnison dans la ville, et vous voyez, Dieu me pardonne ! bonne quantité de hussards. Votre silence peut confirmer des doutes que je nourris depuis longtemps.

Jacqueline.

Ah ! maître André, vous ne m’aimez plus. C’est vainement que vous dissimulez par des paroles bienveillantes la mortelle froideur qui a remplacé tant d’amour. Il n’en eût pas été ainsi jadis ; vous ne parliez pas de ce ton ; ce n’est pas alors sur un mot que vous m’eussiez