Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies II.djvu/64

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Lorenzo.

Frapperais-tu le duc si le duc te frappait, comme il lui est arrivé souvent de commettre, par partie de plaisir, des meurtres facétieux ?

Tebaldeo.

Je le tuerais s’il m’attaquait.

Lorenzo.

Tu me dis cela à moi ?

Tebaldeo.

Pourquoi m’en voudrait-on ? je ne fais de mal à personne. Je passe les journées à l’atelier. Le dimanche, je vais à l’Annonciade ou à Sainte-Marie ; les moines trouvent que j’ai de la voix ; ils me mettent une robe blanche et une calotte rouge, et je fais ma partie dans les chœurs, quelquefois un petit solo : ce sont les seules occasions où je vais en public. Le soir, je vais chez ma maîtresse, et quand la nuit est belle, je la passe sur son balcon. Personne ne me connaît, et je ne connais personne : à qui ma vie ou ma mort peut-elle être utile ?

Lorenzo.

Es-tu républicain ? aimes-tu les princes ?

Tebaldeo.

Je suis artiste ; j’aime ma mère et ma maîtresse.

Lorenzo.

Viens demain à mon palais, je veux te faire faire un tableau d’importance pour le jour de mes noces.

Ils sortent.