Page:Musset - Œuvres complètes d’Alfred de Musset. Comédies III.djvu/355

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point d’écritoire ! Voyons un peu ce que chantait ce pédant… Eh bien ! où diable l’ai-je fourré ?

Il fouille dans ses poches et en tire un papier.
Perillo, à part.

Ce personnage ne m’est point inconnu : est-ce l’absence ou le chagrin qui me trouble ainsi la mémoire ? Il me semble l’avoir vu quand j’étais enfant ; en vérité, cela est étrange ! j’ai oublié le nom de cet homme, et je me souviens de l’avoir aimé.

Minuccio, à lui-même.

Rien de tout cela ne peut m’être utile ; pas un mot n’a le sens commun. Non, je ne crois pas qu’il y ait au monde une chose plus impatientante, plus plate, plus creuse, plus nauséabonde, plus inutilement boursoufflée, qu’un imbécile qui vous plante un mot à la place d’une pensée, qui écrit à côté de ce qu’il voudrait dire, et qui fait de Pégase un cheval de bois comme aux courses de bagues pour s’y essouffler l’âme à accrocher ses rimes ! Aussi où avais-je la tête, d’aller demander à ce Cipolla de me composer une chanson sur les idées d’une jeune fille amoureuse ? Mettre l’esprit d’un ange dans la cervelle d’un cuistre ! Et point de crayon, bon Dieu ! point de papier ! Ah ! voici un jeune homme qui porte une écritoire…

Il s’approche de Perillo.

Pardonnez-moi, monsieur, pourrais-je vous demander ?… Je voudrais écrire deux mots, et je ne sais comment…