dans sa main fluette, sur son bras faible et chancelant ; son front semblait porter l’empreinte de ce diadème d’épines sanglantes dont se couronne la résignation. Je me souvins de la chaumière. Qu’elle était jeune, il y avait six mois ! qu’elle était gaie, libre, insouciante ! Qu’avais-je fait de tout cela ? Il me semblait qu’une voix inconnue me répétait une vieille romance que depuis longtemps j’avais oubliée :
Altra volta, gieri biele,
Blanch’e rossa com’un’flore,
Ma ora no. Non son più biele,
Consumatis dal’ amore.
C’était l’ancienne romance de ma première maîtresse,
et ce patois mélancolique me semblait clair pour la
première fois. Je le répétais comme si je n’eusse fait
jusque-là que le conserver dans ma mémoire sans le
comprendre. Pourquoi l’avais-je appris et pourquoi
m’en souvenais-je ? Elle était là, ma fleur fanée, prête
à mourir, consumée par l’amour.
— Regarde-la, me dis-je en sanglotant ; regarde-la ! Pense à ceux qui se plaignent que leurs maîtresses ne les aiment pas ; la tienne t’aime, elle t’a appartenu ; et tu la perds, et n’as pas su l’aimer.
Mais la douleur était trop forte ; je me levai et marchai de nouveau. — Oui, continuai-je, regarde-la ; pense à ceux que l’ennui dévore, et qui s’en vont traîner au loin une douleur qui n’est point partagée. Les maux