Page:Musset - Biographie d’Alfred de Musset, sa vie et ses œuvres.djvu/138

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la mienne. À l’idée de revoir, en m’éveillant, ce vilain papier d’un vert cru, je crois déjà que l’ennui et le chagrin tapissent mes quatre murs. »

Pour donner satisfaction à cette envie de convalescent, je m’empressai de céder ma chambre, dont le papier était d’un ton très doux, et qui avait deux fenêtres sur un jardin. Le 10 avril, le pauvre enfant prodigue arriva enfin, le visage maigre et les traits altérés. Une fois sous l’aile maternelle, son rétablissement n’était plus qu’une question de temps ; mais on jugera de la gravité de son mal par les lenteurs de la guérison et par les phénomènes psychologiques dont elle a été accompagnée.

La première fois que mon frère voulut nous raconter sa maladie et les véritables causes de son retour à Paris, je le vis tout à coup changer de visage et tomber en syncope. Il eut une attaque de nerfs effrayante, et il fallut un mois avant qu’il pût revenir sur ce sujet et achever son récit.

Alfred demeura longtemps enfermé dans sa chambre. Il n’en sortait que le soir, pour jouer aux échecs avec sa mère. Il avait amené d’Italie une espèce de domestique, perruquier de son état, qui l’avait soigné tant bien que mal durant le voyage, et qui ne savait pas un mot de français. Les services de ce garçon lui étaient agréables, quoique ce fût un valet de chambre assez mauvais. Souvent il appelait Antonio pour lui faire parler le dialecte de son pays ; mais