Page:Musset - Biographie d’Alfred de Musset, sa vie et ses œuvres.djvu/328

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

Probablement il n’y avait aucune corrélation entre l’arrivée de madame Ristori à Paris et les plans secrets de M. de Cavour ; mais Alfred de Musset se plut à considérer le voyage de cette grande actrice comme un présage du lien étroit qui devait unir la France et l’Italie. Son assiduité aux représentations de Mirra et de Marie Stuart fut telle qu’à moins d’être malade ou alité, il n’en manqua pas une seule. Le buste de madame Ristori, par le sculpteur italien Lanzirotti, prit place dans son petit musée sur un haut piédestal construit exprès, et en s’amusant à jouer sur le nom, il appelait cette noble figure, l’Italia ristorata. La poésie devait venir à son tour rendre hommage à la grande tragédienne étrangère. Alfred commença des Stances, que, par malheur, il ne mit point sur le papier, ne les jugeant pas assez achevées. Voici tout ce que j’en ai pu retrouver, avec l’aide de la gouvernante, qui entendit réciter ces vers un à un, à mesure que le poète les composait :


Pour Pauline et Rachel, j’ai chanté l’Espérance,
Et pour la Malibran je me suis attristé.
Grâce à toi, j’aurai vu, dans leur toute-puissance,
  La Force unie à la Beauté.

Conserve-les longtemps ; celui qui t’en supplie
À l’appel du génie eut le cœur toujours prompt.
Rapporte en souriant, dans ta belle Italie,
  Une fleur de France à ton front.

Quelqu’un m’avait bien dit, revenant de voyage,
Que nous autres Français nous ne connaissions rien,