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beaucoup d’amitié. Au moment où il prenait congé d’elle, la princesse lui dit avec sévérité qu’elle lui gardait rancune. En rentrant chez lui, décidé à écrire une lettre bien soumise pour demander sa grâce, il trouve sous sa main une feuille de papier timbré. Il la choisit de préférence et compose une lettre d’excuses, pleine de badinages comiques, qu’il termine en disant que le papier timbré attestera la solennité de ses paroles et la profondeur de son repentir. La première fois qu’il revit la dame offensée, elle lui tendit la main en riant de si bon cœur que les personnes présentes, étonnées de cet accueil, en demandèrent l’explication ; — et on la leur donna.

Même entre gens qui se conviennent parfaitement, il y a des moments, à la campagne, en été, où le temps semble long. C’était alors qu’Alfred de Musset prenait plaisir à donner une impulsion nouvelle à la conversation. Quand il voyait approcher ces moments d’ennui ou de langueur, son esprit inventif avait mille ressources. Un matin, dans un château, la compagnie fort nombreuse s’abandonnait au far niente. Le châtelain vaquait à ses occupations de propriétaire ; les hommes fumaient sur le perron ou lisaient les journaux ; le besoin d’un amusement quelconque se faisait sentir. Quelques dames prirent leurs ouvrages ; une autre se mit au piano et joua un air de mazourke. En écoutant le motif, Alfred crut distinguer dans la première phrase une intention mélanco-