Page:Musset - Poésies, édition Nelson.djvu/74

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Un seul, un seul existe, et te sera connu!
L’hiver prochain, dis-moi, Bell, quel âge auras-tu?
Mais que dis-je? notre âge est à peu près le même.
Je suis folle, et c’est tout. Pauvre Bella, je t’aime
Du fond du cœur.
                  — Mon Dieu ! Georgina, qu’as-tu donc ?
Tu ne te soutiens plus...
                                    — Pardon, chère, pardon !
Tiens, donne-moi ton bras, et revenons ensemble. »
 
Toutes deux lentement marchèrent quelques pas :

« Non ! cria Georgina, non, je ne le puis pas!
Je ne puis pas le fuir ! N’est-ce pas qu’il te semble,
Bella, que je suis pâle, et que je dois souffrir?
C’est le bruit de ces flots, de ce vent qui murmure,
C’est l’aspect de ces bois, c’est toute la nature
Qui me brise le cœur, et qui me fait mourir!...
Ah ! Bella, ma Bella, rien que par la pensée,
Tant souffrir ! Quelle nuit terrible j’ai passée!
Terrible et douce, amie ! écoute, écoute-moi...
 
— Parle, ma Georgina, raconte-moi ta peine.
 
— Oui, tout à toi, Bella, car ma pauvre âme est pleine,
Et qui me soutiendra, chère, si ce n’est toi?
Sœur de mon âme, écoute. O mon unique amie,