Page:Musset - Poésies nouvelles (Charpentier 1857).djvu/286

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

Le front incliné vers la terre ;
L’ardent soleil séchait les larmes de ses yeux.

Aveugle, inconstante, ô fortune !
Supplice enivrant des amours !
Ôte-moi, mémoire importune,
Ôte-moi ces yeux que je vois toujours !

Pourquoi, dans leur beauté suprême,
Pourquoi les ai-je vus briller ?
Tu ne veux plus que je les aime,
Toi qui me défends d’oublier !…

Comme après la douleur, comme après la tempête,
L’homme supplie encore et regarde le ciel,
Le voyageur, levant la tête,
Vit les Alpes debout dans leur calme éternel,

Et, devant lui, le sommet du mont Rose,
Où la neige et l’azur se disputaient gaiement.
Si parmi nous tu descends un moment,
C’est là, blanche Diane, où ton beau pied se pose.

Les chasseurs de chamois en savent quelque chose.
Lorsque, sans peur, mais non pas sans danger,
À travers la prairie au matin fraîche éclose,
On les voit, l’arme au poing, dans ces pics s’engager.

Pendant que le soleil, paisible et fort à l’aise,
Brûle, sans la dorer, la cité milanaise,