Page:Musset - Poésies nouvelles (Charpentier 1857).djvu/287

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Et dans cet horizon, plein de grâce et d’ennui,
S’endort de lassitude à force d’avoir lui,

La montagne se montre : — à vos pieds est l’abîme ;
L’avalanche au-dessus. — Ne vous effrayez pas ; —
Prenez garde au mulet qui peut faire un faux pas.
L’œil perçant du chamois suspendu sur la cime,
Vous voyant trébucher, s’en moquerait tout bas.

Un ravin tortueux conduit à la montagne.
Le voyageur pensif prit ce sentier perdu ;
Puis il se retourna. — La plaine et la campagne,
Tout avait disparu.

Le spectre du glacier, dans sa pourpre pâlie,
Derrière lui s’était dressé,
Les chansons et les pleurs et la belle Italie
Devenaient déjà le passé.

Un aigle noir, planant sur la sombre verdure
Et regardant au loin, tout chargé de souci,
Semblait dire au désert : Quelle est la créature
Qui vient ici ?

Byron, dans sa tristesse altière,
Disait un jour, passant par ce pays :
« Quand je vois aux sapins cet air de cimetière,
Cela ressemble à mes amis. »

Ils sont pourtant beaux, ces pins foudroyés,
Byron, dans ce désert immense ;