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CHAPITRE IX
Les derniers écrits.
1. Les monographies. — 2. Conclusion.

1. — Vers la fin du xixe siècle, on remarque que l’idée d’une esthétique scientifique devient de plus en plus la préoccupation prédominante de tous les esthéticiens. Seulement, et ceci est un vrai bonheur, au lieu de rencontrer de grands échafaudages à bases scientifiques, échafaudages inutilisables, nous trouvons de consciencieux ouvriers qui ramassent des matériaux précieux, taillent les pierres, préparent les poutres utiles à la construction de l’édifice futur. Les monographies s’accumulent h partir de 1890 et avec les monographies on peut dire que l’esthétique entre dans sa phase réellement scientifique et positive.

Il existe pourtant encore quelques auteurs attardés qui cherchent la solution du problème esthétique d’un seul coup — illusion humaine pardonnable, illusion qui prit naissance le jour où Jupiter fit sortir Athéna tout armée de sa tête ; mais Jupiter était un dieu — il existe aussi d’autres auteurs qui se rattachent encore intimement aux erreurs de Taine. Parmi ces derniers, nous devons citer Ferd : Brunetière qui nous présente un cas navrant. Taine croyait bâtir la science esthétique en se fondant sur les analogies qu’elle présente avec les sciences naturelles. Brunetière poussera ces analogies plus loin — il comparera l’œuvre d’art, non plus à une pomme ou une poire, mais à un quadrupède ou un oiseau, à un crocodile ou un poisson. Il enrichira donc la science de Taine en y ajoutant des nouvelles analogies. Brunetière avoue, avec grande conviction, son erreur : «… nous pourrions dire qu’à la critique fondée sur les analogies qu’elle présente avec l’histoire naturelle de Geoffroy Saint-Hilaire et de Cuvier, nous nous proposerons de voir si l’on ne pourrait pas substituer ou ajouter, pour la compléter, une critique à son tour qui se fonderait sur l’histoire naturelle de Darwin et de Haeckel » (1). Cette critique, fondée sur les idées de Haeckel.

(1) L’évolution des genres, etc. (1889) Hachette éd., p. 18.