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D’UNE PARISIENNE

rue Saint-Jacques. Dans une très vieille maison, la Société philanthropique —une institution fort ancienne puisqu’elle remonte à saint Louis, — a établi l’asile de nuit des femmes.

Il est cinq heures ; la lanterne indicatrice portant ces mots : « Asile de nuit » rougeoie dans la pénombre, et lentement, frôlant le mur, une procession de miséreuses s’engage dans l’étroit couloir du refuge.

Je pénètre avec les pauvres femmes dans la salle d’attente, où des bancs s’alignent en bon ordre.

Une douce chaleur règne dans la vaste pièce ; près d’un poêle qui ronfle, les premières arrivées somnolent. Un lourd silence pèse. Aucune ne songe à converser. Les yeux battus, les bouches aux commissures tombantes, les fronts ravinés avant l’âge, disent éloquemment les détresses de toutes sortes où sombrent ces pauvres êtres.

Presque toutes ces femmes ont des enfants ; ils demeurent sages, apaisés dans un engourdissement heureux.