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442 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Ainsi causaient nos voyageurs.

A Caserte ils descendirent, allant chacun de son côté manger un peu de charcuterie et boire.

— De même à Naples, dit Protos, quand nous appro- cherons de sa villa, nous nous séparerons s'il vous plaît. Vous me suivrez de loin ; comme il me faudra quelque temps, surtout s'il n'est point seul, pour lui expliquer qui vous êtes et le but de votre visite, vous n'entrerez qu'un quart d'heure après moi.

— J'en profiterai pour me faire raser. Je n'ai pu trouver le temps ce matin.

Un tram les mena piazza Dante.

— A présent quittons-nous, dit Protos. La route est encore assez longue, mais il vaut mieux ainsi. Marchez à cinquante pas en arrière ; et ne me regardez pas tout le temps comme si vous aviez peur de me perdre ; et ne vous retournez pas non plus ; vous vous feriez suivre. Ayez l'air gai.

Il partit de l'avant. Les yeux demi-baisses suivait Fleurissoire. La rue étroite était en pente raide ; le soleil dardait ; on suait ; on était bousculé par une foule efifer- vescente qui braillait, gesticulait, chantait et ahurissait Fleurissoire. Devant un piano mécanique des enfants demi-nus dansaient. A deux sous le billet, une loterie spontanée s'organisait autour d'un gros dindon plumé qu'à bout de bras levait une espèce de saltimbanque ; pour plus de naturel, en passant Protos prenait un billet et disparaissait dans la foule ; empêché d'avancer, Fleurissoire un instant crut tout de bon l'avoir perdu ; puis le retrou- vait, passé l'encombrement, qui continuait à petits pas la montée, emportant sous son bras le dindon.

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