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980 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

Un jour que les hommes sont à la chasse, je pars en pirogue avec Miss Paine et la sqaw pour chercher du bois de flottaison sur un îlot à cinq milles du camp. Notre hôtesse est devenue intolérable ; depuis plusieurs jours je n'enlève plus mon feutre, de crainte que, voyant mon crâne, il ne lui vienne l'idée de me scalper. Elle connaît mal les devoirs de l'hospitalité, et ne nous parle que pour dire : " Je n'aime pas être avec des imbéciles ". Quand nous descendons sur l'îlot pour ramasser du bois, il me vient un sauvage désir de l'assommer avec une vieille poutre. J'essaie de l'atteindre à la tête, mais je vise mal.

Mrs. Donahoo a de grandes ambitions artistiques. Elle se fait donner des leçons de peinture par Miss Paine. Mon rôle consiste à tenir sa boîte en chassant les moustiques de ma main libre. L'œuvre la plus remarquable de notre hôtesse est le portrait de son mari avec son fusil. Miss Paine a reçu l'ordre d'en faire le pendant, représentant Mrs. Donahoo debout à côté d'une pirogue, et tenant un gros saumon.

Si Miss Paine est professeur de peinture, je suis, moi, professeur de danse. Ces festivités se passent le soir devant le feu du camp. L'orchestre est composé d'Indiens. Les instruments, peu variés, sont des peignes recouverts de papier, que l'on promène le long de la bouche, à la ma- nière d'un harmonica.

Après dix jours passés dans ce deuxième camp, nous sommes partis par la pluie pour Kyuquot. Le vieux "Tees" m'emmènera au nord de l'île, car je désire prolonger le voyage et revenir par la côte est. Il prendra à son retour à Kyuquot les Donahoo, Miss Paine et les autres invités qu'il ramènera à Victoria.

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