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��REFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE

AUTOUR DE JEAN GIRAUDOUX

Les livres de M. Jean Giraudoux inquiètent des lecteurs, en passionnent d'autres, excitent des discussions, créent des amitiés, deviennent peu à peu les murs, les arceaux, les figures, les saints d'une chapelle. Je suppose que M. Pierre Lagasse qui promène en ce moment, pour les lecteurs de la Minerve Française, un bras iconoclaste dans les chapelles littéraires, conduira un jour contre cet oratoire païen, nou- veau Cyrille ou nouvel Antoine, ses moines et ses raisons. Rendons hommage aux services que peut rendre le franc parti de cet ennemi de son temps et de ce dépisteur du roman- tisme et admettons sa chapelle, à lui, sa chapelle sévère où l'on chante au lutrin — celui de Boileau — sur les textes solides d'autrefois. Mais si nous vivons sous le régime des chapelles Httéraires, (et pourquoi pas des chapelles critiques?) si la grande cathédrale centrale apparaît froide et désertée, est-ce nécessairement un mal ? Palerme, ville malpropre, à population malingre, à églises barbares, à jardins médiocres, devient délicieuse par ses admirables oratoires, ces chapelles de confréries, produit parfait de l'art du xviie et du xviiie siècle, qui tiennent du sanctuaire, du boudoir et du théâtre, et où l'on imagine respirante et souriante une vie religieuse comblée de décor et de bonheur. Notre vie littéraire, fatiguée et sensuelle, tend à prendre une

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