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tendancieux ; et c’est leur tendance même qui les porte à la franchise. Notre sincérité leur doit beaucoup. Pour sincèrement se connaître, faudrait-il donc ne tendre à rien, ne rien vouloir ? N’est-ce pas, encore ici, l’ambition des conquêtes durables qui se traduit par une horreur des faux-semblants ? — Certes, il n’est pas aisé de se découvrir soi-même, ni comme individu ni comme peuple, à la lumière de fournaise d’une guerre ou d’une révolution. Mais, ainsi que pour l’art, le résultat vaut bien la peine : où la sincérité coûte le plus, c’est là, non pas ailleurs, qu’elle a le plus de prix.


Personne en cette Revue ne traitera de gratuites des œuvres dont la tendance, tout simplement, lui agrée ; et le mot « gratuité », sous la plume de Rivière, n’avait certainement qu’un sens tout relatif. J’entre dans ce sens ; j’accorde que l’art domine avec moins d’effort une matière peu riche ou d’avance épurée ; j’accorde (encore qu’on puisse le contester) que sa nature propre se révèle surtout dans ses jeux les plus libres, les plus légers, et que, par leur exemple, le respect de la forme se maintient, s’affine, et profite à des travaux plus lourds de vie. La littérature de paix — j’entends celle de tous les siècles — en cela nous offre assez de modèles, assez de leçons. D’autres modèles seront les bienvenus ; devons-nous craindre d’en manquer ? — La thèse ici soutenue semblait être : que l’exigence de la guerre sur les esprits, appelle, pour contre-poids, la recherche volontaire d’une certaine gratuité. Or, quand bien même j’accepterais la thèse, je trouverais à redire aux considérants.

D’abord, je ne consens point qu’« un des méfaits