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RÉFLEXIONS SUR LA LITTÉRATURE 289

celle des historiens ? (Les fortes tentatives de Taine et de Sorel pour fixer la psychologie de l'époque révolutionnaire appartiennent à la ps^^chologie comme celles de Balzac et de Stendhal pour fixer celle de l'époque où ils vivaient, et toute psychologie bien faite d'une époque apporte une lumière sur la nature générale de l'homme.) — Joignez-y même (vous ne serez pas au bout, mais vous atteindrez au moins un chiffre consacré) comme une septième lignée la plus ancienne, la plus obscure, la moins écrite, et, dans les temps modernes la source vraie des autres : tout l'ordre religieux qui cristallise dans l'Église catholique autour de la confession auriculaire et qui pousse encore au xix® siècle, de Lamennais à l'abbé Brémond, de vigoureux rameaux. Tout cela promet à M. Delacroix, qui a l'esprit assez assoupli pour l'embrasser entière, une besogne bien délicate et compliquée, mais bien intéressante.

S'il faut entendre, comme cela paraît raisonnable, par histoire de la psychologie, l'histoire de la suite qui a contri- bué à notre connaissance de l'homme intérieur, peu de noms y compteront plus éminemment que Stendhal. M. Delacroix a écrit un livre fort intelligent, mais la richesse psycholo- gique de Stendhal est telle qu'arrivé à la fin de ce livre on le voudrait au moins doublé pour qu'il répondît à son titre. Le premier chapitre, Stendhal et l'Idéologie nous renseigne exactement sur le rôle d'Helvétius et des Idéologues dans la formation de Stendhal. M. Delacroix insiste uniquement sur les lectures de Stendhal — et c'est son droit, c'est sur- tout la coutume des historiens de la philosophie de voir leur sujet sous l'angle un peu spécial des dérivations d'idées issues de lectures. (Qu'on songe au livre curieux de M. René Berthelot sur Bergson, à l'arbitraire avec lequel toutes les idées de Bergson sauf une, sont rattachées à tel philosophe, et à l'étrange conception qui le montre par exemple emprun- tant « l'idée de vie » à la médecine vitaliste ou à Schelling).

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