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528 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

règne en maître. Presque toutes les œuvres portent le sceau profond de son influence. Il est convenu que les portraits seuls de cette école méritent l'attention. Ils sont en effet d'un accueil facile et, à quelques exceptions près, conservent le sourire engageant des portraits du XVIII® siècle. Mais ces toiles ne pourraient nous tenir qu'un langage déjà entendu à la salle précédente. Nous sommes venus chercher autre chose ici ; une explication du malaise dont nous souffrons ; une image de nous-mêmes réduite, mais déchiffrable. La toile dans laquelle nous nous reconndtrons le mieux est justement celle dont Cézanne avait fixé une reproduction à son mur : les Sahines. Le maître d'Aix porta souvent sur cette œuvre un jugement où son fonds natal de romantisme et sa volonté de classicisme entremêlent les affirmations con- tradictoires. On sent qu'elle le tourmentait. Il dut souvent jeter sur la photographie des regards de désir et de déses- poir, et peut-être ces Hgnes droites et courbes, qui, dans ses tableaux à lui, s'emmêlent, se conjuguent, se répon- dent et s'opposent avec une telle science, n'ont-elles cette démarche savante que parce qu'elles obéissent au rythme dont les Sahines contiennent ou plutôt avouent le secret.

Il faut faire effort pour se séparer du tableau des Lenain. Ce sont les Sahines, qui, maintenant, nous retiennent prisonniers. Merveilleuses et fécondes captivités ! Les personnages de Lenain, devant le regard interrogateur, abandonnèrent insensiblement leur enveloppe fruste, et montrèrent doucement leur âme ; le repas de paysans disparut peu à peu pour faire place à une assemblée de Dieux méditatifs. Les personnages de David nous parlent

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