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PREMIÈRE VISITE AU LOUVRE 531

de son métier. La pensée réduisant l'objet de sa médi- tation jusqu'à ne lui demander qu'une orientation, et s'alimentant d'elle-même ; le peintre se substituant à la nature après avoir accordé à celle-ci la référence la plus courte, voila, grossi pour plus de clarté, l'accident irré- parable qui s*est produit.

Des esprits chagrins le déplorent. Plutôt que de nous demander si c'est un bien ou un mal, ce dont il n'appar- tient qu'à l'avenir de juger, ne serait-il pas préférable de tirer de cette situation nouvelle le meilleur parti ? Ne nous demandons pas plus longtemps si nous eûmes tort ou raison de nous laisser entraîner par un courant inconnu. Nous avons la chance d'être mus par des forces qui cesseront d'être dangereuses le jour où par nos soins elles cesseront d'être aveugles. Il nous suj6&ra, pour échap- per au désastre que l'on prédit inévitable, non de revenir en arrière, — folie que tentent certains essayistes malheureux — mais d'assumer courageusement les fatalités qui nous mènent. Avoir conscience du danger que l'on court, c'est déjà posséder les moyens d'y échapper. Et puis n'avons- nous pas, étoile de notre ciel et boussole de notre pont, le conseil d'humilité de nos maîtres français ?

Est-il si difficile de tirer une conclusion et d'emporter un encouragement de notre première visite au Louvre, malgré les antinomies que la comparaison de deux œuvres types nous a fait relever ?

Nous considérons David comme le prototype du peintre moderne, comme l'artisan de cette révolution qui se continue en nous plus que nous ne la continuons. Le trait qu'il possède en commun avec les peintres traditionnels est celui qu'il nous est indispensable de conserver, puis-

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