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NOTES 149

constitue l'appareil extérieur de leur art qu'on les blâme ou qu'on les loue. Il y a des lieux communs dans tous les styles, à toutes les époques. Lorsque les œuvres sont très anciennes ou lorsqu'elles sont toutes neuves, le public déconcerté ne sait pas discerner entre ce qui est personnel à l'auteur et ce qui est emprunté aux formes particulières d'un langage inaccoutumé. Tantôt ce qu'on admire n'est que la phraséologie à la mode, tantôt on crie au plagiat sans pressentir l'originalité réelle de la mélodie, du rythme, de l'harmonie qui se dissimule sous une forme trop semblable à celle d'autres auteurs pour des sens mal exercés. Il y a quinze ans, on s'obstinait à voir en Ravel un imitateur de Debussy, on convient aujourd'hui que ces deux grands artistes ne se ressemblent pas plus que Chopin et Schumann, ou que Borodine et Moussorgsky.

Il était temps de laisser le nom de Wagner reparaître sur les programmes des Concerts. L'ostracisme dont il était victime risquait de provoquer un retour de fièvre wagnérlenne des plus dangereux. En 19 14, on jouait, on applaudissait la musique de Wagner comme celle de Beethoven, elle n'était plus l'objet d'un culte orgiaque et mystérieux. On cessait de tout rapporter à Wagner, de n'apprécier les musiciens anciens qu'en leur qualité de prophètes du nouveau Messie, Les compositeurs étaient définitivement sortis de son ombre colossale. Il s'en est fallu de peu que nous ne fussions victimes d'une recrudes- cence du mal. La musique proscrite n'en était que plus vénérée. On la jouait avec ferveur dans l'intimité, on allait entendre la parole sacrée dans les temples des bords du Rhin, sous la protection d'un général français que MM. Saint-Saëns et Masson n'osaient accuser d'antipatriotisme. En vérité, il était grand temps d'abattre le barrage et de laisser le fleuve s'épancher, il menaçait de tout submerger. La reprise des exécutions wagnériennes a été accueillie aux concerts Pasdeloup, Colonne et Chevillard avec des transports qui déjà tendent à s'as- sagir. Il faut laisser le public assouvir sur Beethoven et Wagner

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