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262 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

mon entrée un peu avant le soir, lorsque j'y pénétrai afin de déplier mon lit et de tendre ma moustiquaire. La lumière trouble et mobile produite par cette bougie, dont la flamme vacillait dans le globe du photophore, rouillait l'espace entre les cloisons ; le sol en glaise battue, rouge brique, était rayé d'ombres immobiles et il sautillait soudain aux sursauts de la petite langue de feu jaune dont le frisson- nement brusquait l'inertie de la terre ; les quatre coins de ce réduit étaient quatre piliers noirs massifs, bruts, qui réduisaient le déplacement dans le lieu.

Ce fut dans cet éclairage louche que je dis à Montert à quel point mon voyage de Nola à Mogounga avait été monotone. Les nuits ! ah ! les nuits... Je marchais le soir tant que je n'avais pas rencontré un de ces solitaires logis d'écorce et de branches où s'abritait un couple de noirs de la forêt, d'Echiras teints en rouge. J'y arrivais souvent alors que la nuit enfermait la forêt depuis deux heures déjà. Un feu s'éteignait dans le trou qui était le foyer et dans la case encroûtée de suie je m'imaginais reposer sous la hotte d'une cheminée de chez nous. La pluie crépitait au-dessus de ma tête ; les chocs des gouttes faisaient se détacher la suie du plafond et des duvets noirs poudraient mes mains. L'homme et la femme accroupis devant la porte contemplaient en grelottant la forêt. Muets, ils paraissaient être dans l'attente d'un événement. Parfois un enfant pleurait, invisible dans l'obscurité de l'un des angles de la case.

Moi, je mangeais des bananes en regardant comme eux les arbres ; je me sentais influencé par l'inertie de ces êtres ; elle me gagnait ; et puis il y avait sur le toit le grattement monotone de la pluie ; et puis il y avait le

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