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REFLEXIONS SUR LA LITTERATURE 735

nir une Caspienne. Cela n'empêche pas qu'il n'y ait dans certains milieux néo-classiques un snobisme de Bossuet. Un bon snobisme, dira peut-être M. Truc, un hommage que le vice rend à la vertu. Peut-être bien. Je le suivrai volontiers, sur ce chemin de l'indulgence, et je sais que tout compte fait, ce snobisme rend beaucoup plus de services qu'il ne cause de dommage.

��Dans sa recherche des déformations littéraires, M. Truc passe à quelques contemporains qui nous touchent de plus près. Ce sont André Gide et Marcel Proust.

Gide « nous eût donné des livres supérieurs à ceux qu'il a écrits si une critique impitoyable avait pris soin de le mettre en garde contre des excès faciles. » Les illusions de M. Truc sur les bienfaits de la critique sont bien vieilles chez les critiques et résisteront à tous les démentis de Texpérience, parce qu'elles sont liées à l'orgueil naturel du métier. Les écrivains ont toujours tiré de grands services de la critique officieuse de leurs amis : le vrai critique bienfaisant de Flaubert ce fut Bouilhet. Cette critique, un auteur intelligent, Gide comme les autres, la recherche, je crois, et l'utilise. Quant à la critique professionnelle elle n'a jamais eu que peu d'effet sur les écrivains, le cas unique de Corneille et des Sentiments de l'Académie étant mis à part, et les conseils des critiques aux auteurs semblent en général et avec raison fort ridicules à ceux-ci. Tout au plus un critique peut-il indiquer utilement, parmi les directions d'un écrivain, celle qui a ses préférences et où il aimerait le voir s'engager. Là encore il peut se tromper. L'instinct vital qui défendait à Flaubert d'écrire une seconde Bovary était probablement plus sûr que le conseil des critiques qui l'invitait à redoubler. Mieux vaut que le succès de la Porte Etroite auprès de la critique n'ait pas incité Gide à en refaire une autre, et qu'il ait de préfé-

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