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Page:NRF 15.djvu/174

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î68 LA NOUVELLE REVUE FRANÇAISE

D'un paradis si difficile qui manque, que tout l'être y soit intéressé.

Ce n'est point dans le hasard que je t'aime, mais c'est dans la justice et la nécessité.

Si je ne vivais pas le premier, sens-tu bien mainte- nant que tu ne pourrais vivre ni te mouvoir ?

Ce que j'ai été fait pour t'apporter, de nul autre tu n'aurais pu le recevoir.

Ouvre les yeux, sœur chérie, et reconnais-moi !

Prends, et ne ménage rien, et saisis ce qui a été fait éternellement pour être ta proie,

Ce grand don terrible de l'amour qui ne va pas sans dilacération !

Ce qui était le plus caché en nous a reçu manifestation.

O mon compagnon immortel ! ô mon étoile du matin entre mes bras !

L'amour était trop grand entre nous pour que satis- faction lui fût possible ici-bas !

Ce n'est pas par un chemin si court que l'on va jus- qu'à notre être.

Et ta joie, tu me l'as donnée. Mais ta soif, ne me la feras-tu pas connaître }

Le désert, me le refuseras-tu ? et, toutes ces années,

Ce que c'est que d'être sans ma vie, ne me le feras- tu pas essayer ?

Pour que l'âme avec les larmes jaillisse et la flamme en grande effusion avec le sang,

Cette blessure, avec quoi me l'aurais-tu faite si pro- fonde qu'en te retirant ?

Ah, le temps n'a pas eu de prise sur nous et la mort n'a pas réussi !

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